Lettre ouverte à M. Aliaune Badara Thiam alias Akon, chanteur et
producteur de RnB américano-sénégalais
Libreville, le 18 février 2014
Objet : Votre projet d’électrification de l’Afrique
Monsieur,
Depuis le
début de cette année, vous parcourez les pays africains dans le cadre d’un
périple nommé : « Tournée d’Akon en faveur de l’électrification de
l’Afrique » qui vise 9 pays africains, dont le Gabon. Vous êtes donc
porteur d’un projet d’électrification de villages en Afrique. Baptisé :
« Akon Lighting Africa », ce projet a pour but d’apporter de
l’électricité à près d’un million de ménages ruraux africains, à l’aide de
l’énergie solaire, ce qui, pour vous, serait votre contribution au développement
de l’Afrique.
Vous êtes
une star internationale reconnue, mais ce n’est pas la musique, votre domaine
d’excellence, qui vous amène au Gabon : c’est plutôt le business avec Ali
Bongo et ses amis.
Nous
dénonçons cette énième tentative de détournement et de blanchiment de fonds
publics gabonais que nous entrevoyons car, depuis plus de quatre ans que M. Ali
Bongo a pris le pouvoir, rien ne s’est fait au niveau social et, sauf votre
respect, ce n’est pas vous qui allez changer la donne. Au mieux, vos affaires
vont servir à vous enrichir et à remplir encore plus les poches des kleptomanes
à la tête du Gabon. Par expérience, nous parions qu’aucun village ne sera
électrifié grâce à votre projet.
Comme vous,
Richard Attias a annoncé des milliers de créations d’emploi à la faveur de son
New York Forum Africa. Après deux éditions, en attendant la troisième qui est
prévue de se tenir au mois de mai prochain, aucun bilan social ne peut être
fait de ce gouffre financier. Seulement, l’argent des Gabonais a servi à
enrichir encore plus M. Attias, associés, coquins et complices.
Akon, prenez
le temps de consulter les données financières du Gabon et dites-nous en quoi
votre projet social est approprié pour notre pays. Nous estimons que le Gabon
n’a aucunement besoin de votre charité et que si les bénéfices issus de
l’exploitation des ressources naturelles du Gabon étaient gérés correctement,
chaque Gabonais devrait vivre décemment. Vous ridiculisez votre projet en
y intégrant le Gabon et vous vous déshonorez. Nous vous conseillons de vous
tournez plutôt vers les pays qui ont réellement besoin de votre charité. Il y
en a quelques uns en Afrique. Par exemple, le Sénégal, votre pays d’origine.
Vous voulez
faire œuvre utile pour le Gabon ? Nous vous proposons un plan en
béton :
- Dénoncez le pouvoir illégitime d’Ali Bongo qui n’a pas été élu par le
peuple gabonais. Il a succédé à son père, qui a régné pendant plus de
quarante ans sur le Gabon, grâce au soutien d’institutions et d’une armée
dirigées par des membres de sa famille, à l’exemple de la présidente de la Cour
constitutionnelle qui est une maîtresse officielle de son père.
- Dénoncez les crimes rituels dont vous avez sans doute entendu parler.
C’est une pratique barbare qui consiste à prélever, à vif, les organes vitaux
d’un individu (yeux, langue, sexe….) afin d’obtenir pourvoir, argent et gloire.
Nous savons que les crimes rituels sont commandités par les hommes au pouvoir.
En effet, depuis l’avènement d’Ali Bongo au pouvoir, nous assistons à une
recrudescence des crimes rituels avec impunité totale des criminels et des
commanditaires. Il ne se passe pas un jour sans qu’on trouve un cadavre mutilé
quelque part au Gabon.
Nous vous informons que notre lutte contre ce fléau nous a valu le soutien
des cyberactivistes « Anonymous » dans un message d’avertissement
envoyé le 13 avril dernier au pouvoir gabonais, et nous continuons à nous
battre pour que justice soit faite.
- Dénoncez le peu de cas qui est fait de l’éducation
de nos enfants qui s’entassent dans des salles de classes de plus de cent
élèves, Ali Bongo n’ayant pas jugé utile de construire une seule école depuis
son accession au pouvoir. En revanche, il fait réquisitionner les vestiaires
d’un stade de football en guise de salles de classe.
En décembre dernier, des centaines d’élèves sont descendus dans la rue pour
soutenir leurs enseignants en grève pendant deux mois. Pour toute réponse à
leurs revendications légitimes, Ali Bongo leur a envoyé un contingent de militaires
pour les mater
- Dénoncez le fait qu’au Gabon, les femmes accouchent
encore à même le sol, et les étudiants de l’unique université du pays étudient
dans des conditions plus que déplorables (cf. reportage de France 24, Les
Observateurs, diffusé le 6 avril 2013)
Nous nous
arrêtons à ces quatre items pour vous aider à comprendre le sens de notre
combat et la raison de notre interpellation.
Convaincus
que vous, le petit Sénégalais de Saint-Louis devenu une grande vedette
américaine, portez en vous les nobles valeurs d’humanité, de liberté, d’égalité
de chances, et que vous placez la dignité humaine au-dessus de tout, nous vous
demandons d’examiner, en conscience, l’opportunité de votre présence au Gabon.
De fait,
nous en appelons à votre conscience, à votre humanité et vous demandons de
renoncer à implanter votre projet au Gabon car ce ne sera que pure opération de
communication à la gloire d’Ali Bongo.
Nous
espérons que vous avez le sens de l’Histoire et c’est dans ce cadre que nous
vous demandons d’analyser la portée historique de votre soutien au pouvoir en
place. Parce que notre peuple serait très ravi de vous accueillir en d’autres
circonstances, nous affirmons que votre présence à Libreville sera, pour nous,
une prise de position ouverte contre les Gabonais.
Nos
priorités sont l’éducation, la santé, le logement. M. Bongo et son gouvernement
seront incapables de vous montrer leurs réalisations ne fusse que dans ces
domaines en 4 ans de pouvoir.
Pour la
bonne règle, nous vous informons que le contenu de la présente sera communiqué
à la presse, aux organisations de la société civile et de défense des droits de
l’Homme à travers le monde.
Nous
espérons que vous comprenez notre démarche.
Veuillez
agréer, Monsieur, l’expression de nos salutations distinguées.
Pour la
Convention nationale des Syndicats du Secteur Education (CONASYSED), Marcel
LIBAMA, Délégué chargé de l’Administration – contact : +241 06 77 28 71
Pour le
Front des Indignés du Gabon, M. Grégory NGBWA MINTSA, Prix de l’Intégrité
Transparency International 2009 et 2010 - contact : +241 06 24 61 57
Pour le
mouvement citoyen « ça suffit comme ça », Marc ONA ESSANGUI, Prix Goldman 2009
- contact : +241 07 29 41 40
Pour le
Collectif des Femmes contre les Crimes rituels, Blanche SIMONNY ABEGUE,
Présidente - contact : +241 06 49 08 39
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